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Olympe de Gouges

Bien qu’une sororité au pouvoir permettrait aux politiciennes d’améliorer la condition des femmes, selon Manon Tremblay et Réjean Pelletier, les seules actions communes et solidaires qui existent sont ponctuelles et souvent non formelles.

Mais pourquoi donc les politiciennes peinent-elles là où leurs homologues masculins excellent ?

1. Le faible nombre de femmes implique un choix relationnel restreint. En effet, alors que le nombre de femmes est limité, la diversité des profils idéologiques est vaste. Il est donc difficile- dans ces conditions de restriction numérique -de se mettre d’accord sur les moyens d’action et sur les finalités.
En revanche, il existe des groupes politiques femmes qui s’entendent officiellement sur leurs projets et valeurs. Grâce à ces groupes, les femmes démontrent qu’elles arrivent à se rassembler pour lutter ensemble .

2. Le syndrome de la Reine Abeille (Queen Bee Syndrome) : les plus anciennes politiciennes peinent à accepter les nouvelles recrues, et ce, surtout si elles ne les connaissent pas hors parti.

Les Queen Bee déplacent ce qu’elles ont vécu avec les politiciens masculins sur les nouvelles politiciennes ou candidates en les excluant des grands événements médiatiques, des postes à responsabilité à l’interne des partis, des commissions, etc.
A l’instar des politiciens qui s’octroient les plus grandes tranches du gâteau médiatique, la Queen Bee- craignant de perdre sa place privilégiée (reine) – n’offre pas d’espace médiatique égal aux nouvelles candidates et leur refuse bon nombre d’opportunités.

En revanche, les politiciennes fraîchement arrivées mais qui font déjà parties du réseau de la Reine Abeille (de part leur cercle philanthropique, professionnel, politique, religieux ou amical) sont spontanément prises sous son aile.
Enfin, la Queen Bee clive le groupe politique en discriminant les nouvelles venues tout en prenant soin de celles qui appartiennent au même cercle extra politique.

En conséquence, au lieu de former un groupe politique de partage et de solidarité, la Queen Bee divise les femmes entre elles, ce qui lui permet de ne pas être détrônée. A savoir que le biais de similarité doit certainement y être pour quelque chose (tendance à s’affilier auprès de personnes ayant les mêmes affinités et à exclure les autres).

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3. Le modèle culturel n’apprend pas aux femmes la solidarité selon Manon Tremblay.

A cette constatation je rajouterais mon hypothèse: le fait que dès petites, les filles restent souvent cantonnées dans la sphère domestique -tandis que les garçons sont davantage orientés à l’extérieur, dans des groupes sportifs dans lesquels ils expérimentent les bienfaits de l’esprit d’équipe-les pénnalisent, car elles n’ont pas accès à certains apprentissages (compétition intra et intergroupale, esprit d’équipe, valorisation de son image).

Aussi, comme les groupes sportifs (foot, hockey,etc ) sont très médiatisés et valorisés, la gente masculine assimile très tôt qu’ensemble on va plus loin et ce, malgré les divergences d’opinions.

Certes des groupes de solidarité comme ceux de femmes philanthopiques fleurissent, mais souvent, lorsque ces philanthropes se retrouvent dans des groupes politiques femmes ou mixtes, elles discriminent à leur tour celles qui ne font pas partie de leur cercle alors qu’en tant que philanthropes elles seraient censées mettre en application une solidarité de manière spontanée et désintéressée envers tout-un-chacune. Il serait pertinent de repenser le concept de philanthropie qui tend-originnellement-vers une solidarité non calculée et universelle.

4. Les femmes sont élues en fonction de leur base territoriale et de leur parti, non pas pour représenter un groupe de population.

5.La discipline et les règles du parti offrent peu d’autonomie décisionnelle aux femmes. (Hedlund 1988).

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Christine de Pizan

6. La crainte de l’opinion électorale. En s’alliant entre femmes, les politiciennes craignent que l’électorat ne pense qu’elles ne traiteront que les dossiers « femmes » ou qu’on les associe de manière caricaturale et péjorative au féminisme qui est aujourd’hui encore vu à travers le prisme d’idées reçues archaïques.

7. L’effet Rosenthal et le souci de désirabilité envers la gente masculine. Les politiciennes vivent dans la crainte du jugement des politiciens, dans la peur d’une perte électorale massive au sein du parti et à l’externe. Chaque mot, chaque attitude est réfléchie mais pas librement.
Les politiciennes sont en outre conscientes du fait que revendiquer le fait d’être féministe peut inciter des politiciens à croire naïvement qu’elles font preuve de « manquement à leur parti »ou que « c’est les femmes contre les hommes » alors que bien au contraire, elle cherchent à instaurer équité et justice (de traitement).

Enfin, pour qu’une sororité politique entre femmes puisse s’instaurer, il faut impérativement que les femmes résilient avec leur dépendance au souci de désirabilité, qu’elles ne reproduisent pas la discrimination envers leurs consoeurs politiques qui n’appartiennent pas au même groupe social, professionnel, religieux, régional ou philanthropique. Nous sommes toutes capables de briser ces chaînes, il suffit de déposer nos oeillères au vestiaire et de s’ouvrir à l’Autre et ce, indépendament de nos différences.

Schaffter Coralie

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